- Mais comme le temps nous est compté et souvent conté, tu ne peux pas rester frappé de mutisme jusqu’au jour du jugement dernier, me dirait mon ami le philosophe.
Un timide rabattement, quasi inexistant, de mes paupières.
Et il poursuivrait:
- De deux choses l’une! Soit tu réagis, soit tu t’écrases. Pas question de faire appel aux autres. Ni à la famille, ni aux autorités. Surtout que tu n’est qu’un vulgaire numéro pour cette dernière aux multiples facettes. Tu nais seul et tu meurs seul. Sauf si tu as un frère jumeau ou une sœur jumelle. Et encore! Car dans l’utérus déjà, il y aurait de la concurrence et parfois de la violence voire une tentative de meurtre parmi les monozygotes... à savoir qui verra la lumière en premier sans se soucier de l’autre... Pour preuve: en tant qu’individu univitellin sorti avant mon frérot, j’ai failli mourir à cause de nombreux coups de pied sur ma tête venant de sa part... Que veux-tu, j’étais si pressé de mettre pied à terre que j’ai tout fait à l’envers et j’ai failli ainsi perdre la raison à jamais. Mais heureusement, la providence m’a sauvé.
Alors, alors, alors... je ferme les yeux et les rouvre aussitôt.
Et ce qui était n’est plus. La rue est totalement déserte. Seul l’asphalte rayonne par sa couleur grise.
- Aussi grise que la matière grise, je murmure...