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Hank Vogel

  • L'étranger aux yeux bleus (2, à suivre)

    L'étranger aux yeux bleus de Hank Vogel.jpgLa serveuse:
         •    Mais ce n’est pas une vie.

     L’étranger:
         •    Et pourquoi donc?...

     La serveuse:
         •    Parce que vous devez lutter comme des fous pour un peu d’eau et un peu de verdure.

     L’étranger:
         •    Et votre vie, n’est-elle pas aussi faites de luttes?

     La serveuse:
         •    Elle n’est pas aussi folle. Nous ne luttons pas pour un peu d’eau.

     L’étranger:
         •    Elle est pire, vous travaillez comme des fous toute votre vie pour quelques bien-êtres superflus et quelques semaines de vacances, de liberté par année... Ma contrée, le désert, est l’image de la vie. Il enseigne la raison et le respect. Il faut être raisonnable et respectueux devant le puits d’eau et le figuier. Le gaspillage, la colère et les larmes sont des accidents... des accidents qui peuvent être mortels....

     La serveuse:
         •    Pourquoi il faut?

     L’étranger:
         •    Parce qu’il suffit de ne pas l’être pour que la mort soit à nos trousses. Le désert ne pardonne pas aux inconscients, ni aux maladroits.

     La serveuse:
         •    En somme celui qui vient du désert... c’est quelqu’un de bien?

     L’étranger:
         •    Un homme! Dans le plus profond sens du mot.

    Le serveuse:
         •    Alors pourquoi... pourquoi...

     L’étranger :
         •    Pourquoi mes amis m’ont-ils envoyé parmi vous?

     La serveuse:
         •    Oui, pourquoi?

     L’étranger:
         •    Chez nous,  lorsque nous voulons parler des vieux nous disons les sages. Je sais, je sais,  beaucoup de vieux ne méritent pas ce titre mais c’est la coutume. Certains sont de vrais sages, les autres de vieux bonhommes encore à la recherche de la vérité... Ce sont les vieux curieux qui m’ont envoyé parmi vous.

     La serveuse:
         •    Pourquoi ne sont-ils pas venus eux-mêmes?

     L’étranger:
         •    Écoutez-moi bien, beaucoup de personnes cherchent la vérité et comme des enfants attachés au jupon de leur mère, ils ont besoin de paroles, de messages, de conseils, d’histoires, de preuves...Vous comprenez? Je serai en quelque sorte un livre ou un être mystérieux, mystérieux parce que je serai revenu d’un monde inconnu.

     La serveuse:
         •    N’est-il pas plus simple de découvrir le vérité par soi-même?

     L’étranger:
         •    Un enfant, n’a-t-il pas besoin de la main de son père ou de sa mère?

     La serveuse:
         •    Mais le désert n’enseigne-t-il pas le respect et la raison?

     L’étranger:
         •    Oui, c’est vrai, il enseigne tout ça... Et que faites-vous du courage?... Le courage, c’est l’aiglon qui est devenu aigle; c’est cet oiseau-là qui se jette dans le vide pour la première fois et ne retourne plus vers sa mère. Nous devons nous débarrasser de ces chaînes qui alourdissent nos jambes et qui déforment notre démarche. Car celui qui n’a plus de chaines aux pieds est un homme libre et il n’a pas plus peur de rien.

     Le serveuse:
         •    Un homme courageux est un homme qui n’a plus de chaines?

     L’étranger:
         •    Ne dîtes pas un homme courageux mais un homme libre. Le courage, c’est le fait d’avoir sauté dans le vide, l’inconnu, pour la première fois. C’est aussi le fait d’avoir osé détacher ses chaines. C’est ça le courage. Un homme libre, c’est quelqu’un de léger, qui n’a plus de craintes ni de soucis...

     La serveuse:
         •    Êtes-vous cet homme-là?

     L’étranger
         •    Je ne suis qu’un berger aux yeux bleus, un poète qui parle au désert...

     La serveuse: 
         •    Je pensais bien que vous étiez un poète.

     L’étranger:
         •    On ma baptisé poète mais pour Dieu tous ses fils sont des poètes.

     La serveuse:
         •    Vous n’avez pas répondu à ma question.

     L’étranger:
         •    Laquelle?

     Le serveuse:
         •    Êtes-vous un homme libre?

     L’étranger:
         •    J’ai un message à apporter à mes frères.

     La serveuse:
         •    Vous ne voulez pas me répondre?

     L’étranger:
         •    Comment voulez-vous que je vous dise ce que je suis, puisque moi-même je ne le sais pas? Une eau éternellement calme, sait-elle qu’elle est calme? C’est le voyageur qui passe par là qui peut dire: comme elle est calme cette eau! Il est très difficile de parler de soi. Nous ne sommes pas ceci ou cela, mais nous vivons, sentons ceci ou cela.

     La serveuse:
         •    Je comprends... Pourquoi parlez vous au désert?

     L’étranger:
         •    Je parle aux choses et aux êtres que j’aime. Je parle aussi aux oiseaux, au sable, aux montagnes, aux femmes, aux enfants... 

     La serveuse:
         •    Vous êtes un sage.

    L'étranger:

         •    Chacun a ses propres goûts. Celui qui aime la viande nomme celle-ci délice et celui qui ne l’aime pas la rejette en criant: éloignez-moi cette charogne de là. Pour vous, je suis peut-être un sage et pour quelqu’un d’autre un artiste, un illuminé ou un malade mentale. Pensez de moi ce que vous voulez

     La serveuse:
         •    Pourquoi vous ont-ils envoyé ici, dans ce pays, et non pas en France ou en Italie?

     L’étranger:
         •    Ils pensent que ce pays est le pays de la bonté. Ils ne voulaient pas que j’aille dans des pays où règnent de mauvaises forces... Mais ils se sont mis le doigt dans l’œil.

     La serveuse:
         •    De mauvaises forces?

     L’étranger:

         •    Les forces du diable, les mauvaises actions. Ils pensent que la Suisse sera le pays qui fera régner la paix sur la terre.

     La serveuse:
         •    Et vous? Vous ne le pensez pas?

     L’étranger :
         •    Lorsqu’on aperçoit une corbeille pleines de fruits mûrs et beaux, on s’exclame:  Ô que la corbeille est belle! Même si au fond de celle-ci se trouvent quelques fruits pourris. Il y a tant de corbeilles sur cette terre et tant de corbeilles avec des fruits pourris au fond...  

     La serveuse:
         •    Vous n’aimez pas mon pays?

     L’étranger :
         •    Je n’aime pas le mot pays. J’aime la terre et ses contrées. Il faut voire les choses telles qu’elles sont. Les vieux curieux pensent que je découvrirai un monde parfait, un monde sans agressivité, sans armé... mais ils se mettent carrément le doigt dans l’œil... Le monde est monde partout. 

     La serveuse:
         •    Vous allez les décevoir?

     L’étranger:
         •    Non pas du tout. Certains me croiront, les autres pas.

     La serveuse:
         •    Pourtant, on vit bien ici.

     L’étranger: 
         •    Le sage vit bien partout. Malgré que les maladies de l’âme courent les rues..... là où le soleil brille, là où les montagnes sont belles, là où l’herbe est abondante...

     Le serveuse:
         •    Qu’est-ce que c’est exactement un sage?

     L’étranger :
         •    Ce n’est rien.

     La serveuse:
         •    Rien?...